ZFE : La nouvelle guillotine sociale roule à l’électrique

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« Si tu n’as pas de Tesla, tu ne vaux rien. » Voilà, en substance, le mantra non écrit mais savamment appliqué de la politique des Zones à Faibles Émissions, ces fameuses ZFE qui, sous couvert de sauver la planète, semblent surtout vouloir flinguer les dernières Peugeot 207 vaillantes qui traînent encore dans les banlieues. Depuis le 1er janvier à Lyon, plus de 80 000 véhicules — des Crit’Air 3, cette nouvelle forme de casier judiciaire automobile — ont été déclarés indésirables, pestiférés du bitume. Leur crime ? Être nés avant l’avènement du turbo-diesel repentant et de la batterie lithium-sacrée.

À force de purifier l’air, on a fini par asphyxier les pauvres.

Bruno, par exemple, qui bosse dans le centre de Lyon, continue de rouler avec sa 207, mais « à ses risques et périls ». Pas parce qu’elle menace d’exploser, non, mais parce qu’elle menace de lui coûter une amende à chaque feu rouge franchi. Il n’a pas les moyens de s’offrir un SUV hybride bardé de capteurs anti-pauvreté, alors il triche. Il roule. Il respire. Il survit. Et ce simple acte de vie devient subversif dans une ville où le macaron Crit’Air fait foi.

Mais attention, malheureux ! Ne dites surtout pas que ces mesures sont injustes. Il paraît qu’il faut « sauver l’air ». Un air que, paradoxalement, on n’a jamais autant vu circuler dans des salons fermés, des séminaires d’urbanisme où l’on pense la ville sans ceux qui y vivent. Car les ZFE, c’est ça : la reconquête de l’espace urbain, non pas par des tanks, mais par des vignettes. Ce n’est plus « Interdit aux pauvres » sur la vitrine du resto chic, c’est « Interdit aux moteurs d’avant 2011 » sur toute une agglomération.

La planète, on veut la sauver à coups d’amendes et de vignettes. C’est le développement durable, version huissier.

Et comme toujours dans les grandes réformes « écologiques » à la française, on commence par taper sur les classes populaires avant de discuter pollution industrielle. Le diesel du prolo est l’ennemi, pas les jets privés ni les cargos géants qui transportent les vélos chinois en aluminium recyclé.

Alors la grogne monte. Elle a la voix de Michel, retraité de Lyon, qui en a « ras-le-bol des pistes cyclables dessinées par des gens qui n’ont jamais mis un pied hors du 6e arrondissement ». Elle a le klaxon de Mousse, qui n’a pas changé de voiture depuis Sarkozy mais se fait aujourd’hui accuser de crime climatique. Elle a le parfum des débuts des Gilets Jaunes, ce soulèvement né d’un autre impôt vert qui ne visait que les godillots de la République oubliée.

Face à cette tension grandissante, certains élus flairent le vent de la fronde. Vincent Louault, sénateur à la plume habile, propose de « subtilement dévitaliser » les ZFE. Une formule de croque-mort pour enterrer ces zones sans avoir l’air de les assassiner. Dans la foulée, Laurent Wauquiez, toujours prompt à enfourcher les colères populaires comme d’autres enfourchent des trottinettes en libre-service, promet la suspension pure et simple du dispositif. Et derrière eux, une cohorte de sénateurs et députés bien contents de retrouver une cause qui sente un peu plus le cambouis que le compost.

Car oui, l’argument de fond est là : les ZFE ne seraient pas seulement inefficaces, elles seraient surtout clivantes. Elles opposeraient les centres-villes boboïsés aux périphéries laborieuses, les conducteurs de Zoé à ceux de Clio, les rêveurs d’urbanisme participatif aux travailleurs du matin blafard. Tout cela pour s’attaquer à, tenez-vous bien, 5 à 6 % de la pollution, selon les chiffres officiels. Une goutte dans l’échappement.

La bagnole est devenue le nouveau totem de la honte. Et comme tout totem moderne, elle se brûle sur l’autel de la vertu verte.

On assiste donc à une drôle d’alchimie politique : un sujet hyper technique, en apparence indiscutable (qui oserait défendre la pollution ?), devient un détonateur social, un accélérateur de populisme, un cauchemar de communication pour les élus verts. Ce n’est plus une politique publique, c’est une guerre culturelle avec des pots d’échappement pour champs de bataille.

Et pendant ce temps-là, les métropoles déploient les radars anti-vieux moteurs comme on posait autrefois les pièges à loup. L’écologie de la peur. L’écologie de l’interdiction. Une écologie qui punit au lieu de convaincre. Qui exclut au lieu de transformer. Bref, une écologie qui donne envie de fumer… des pneus.

***Les journalistes d’EnAlerte.fr utilisent un nom d’emprunt et une image générée par IA pour préserver leur confidentialité et garantir leur liberté d’expression.***
Lucien Gregoire
Lucien Gregoire
Artisan ébéniste à Toulouse, Lucien Grégoire, 45 ans, sculpte le bois avec passion, mais aussi les idées avec impertinence. Avec EnAlerte.fr, il se fait le porte-voix d’une critique sociale acérée, où le sarcasme devient une arme pour mettre en lumière les vérités que l’on préfère ignorer.

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