Nous sommes en 2025, et la France a de nouveau une crise existentielle. Comme un acteur de cinéma qui passe trop de temps devant le miroir en murmurant « Qui suis-je vraiment ? », la nation tricolore redécouvre, tous les dix ans, qu’elle a perdu son manuel d’instructions. Cette fois, c’est François Bayrou qui nous propose une thérapie de groupe. L’objectif ? Se regarder dans les yeux et « dire les choses franchement ». Ce qui, en politique, signifie généralement « ne surtout rien dire qui puisse contrarier qui que ce soit ».
Quand on commence à douter de son identité, c’est qu’on est déjà en train de remplir un formulaire pour la changer.
Le débat sur l’identité française est un marronnier aussi vieux que la Ve République, sauf qu’à force d’être replanté, il ressemble désormais à une forêt tropicale. D’un côté, il y a ceux qui pensent que « être Français » se résume à avoir un passeport et un abonnement à la CAF. De l’autre, ceux qui vous expliquent qu’il faut réciter Racine en alexandrins sous un drapeau tricolore pour prétendre appartenir à la nation. Et au milieu, la grande majorité des Français, qui n’avaient rien demandé et qui se demandent surtout pourquoi on leur repose toujours la même question.
Bayrou veut une discussion franche, mais sur quoi exactement ? Que la France n’est plus très sûre d’elle ? Qu’elle a oublié son propre mode d’emploi entre deux débats sur l’écriture inclusive et la pertinence de conserver Napoléon dans les manuels scolaires ? Ou que nous sommes devenus un pays où parler d’identité nationale est plus tabou que d’afficher un compte offshore au Panama ?
Le drapeau flotte toujours, mais on se demande parfois s’il est encore attaché au même mât.
Rappellons-nous que la France repose sur des piliers historiques : un héritage judéo-chrétien, une République laïque et une appartenance européenne. Que tout cela a longtemps constitué une boussole stable, jusqu’à ce que le GPS culturel tombe en panne. Parce qu’en 2025, la seule chose qui unit encore les Français, c’est peut-être la haine du service client de la SNCF.
Notre identité est-elle une question de transmission ? De culture ? D’adhésion à des valeurs ? Oui, sans doute. Mais encore faut-il oser le dire. Parce qu’aujourd’hui, affirmer que la France est un pays laïque, attaché à ses traditions et à son histoire, c’est s’exposer à un débat télévisé où l’on vous expliquera que la baguette est un concept oppressif et que le français est une langue trop genrée pour être réellement démocratique.
Et pourtant, à l’étranger, la France conserve son aura. Demandez à un touriste ce qu’est la France : il vous parlera de Montmartre, de la gastronomie et du romantisme. Demandez-le aux Français eux-mêmes, et ils vous répondront par une dissertation de 30 pages où ils finiront par douter de leur propre existence.
Il fut un temps où la France rayonnait. Aujourd’hui, elle hésite à allumer la lumière de peur d’être accusée d’éclairer trop fort.
Alors, faut-il débattre de l’identité française ? Peut-être. Mais à force d’en parler comme d’un concept flou, on finit par oublier qu’elle existe réellement. L’identité, ce n’est pas un questionnaire à choix multiples où chacun peut cocher ce qui l’arrange. C’est une continuité historique, une culture qui évolue sans se dissoudre. Mais aujourd’hui, cette simple évidence semble aussi révolutionnaire que de proposer une loi interdisant le vol de trottinettes électriques.
En 2025, la France ne sait plus très bien si elle est un pays ou un projet en open source où chacun apporte sa ligne de code. Et c’est peut-être ça, le vrai problème. Parce qu’une nation qui passe son temps à débattre de son identité, c’est un peu comme un adulte qui continue à demander à ses parents s’ils l’aiment : à un moment, il faut grandir.